Dernière modification le 9 juillet 2018 par jeff

Pour les parents, l’aide aux devoirs est presque une obligation, un passage obligé dans le cadre de la scolarité de son enfant. Cela va de soi. Mais par moments cette intervention des parents, qu’elle concerne les devoirs ou non, n’est plus pertinente. Pourquoi alors les parents doivent avoir la clairvoyance de se retirer, de ne plus se « mêler » des devoirs de leur enfant ? Comment alors les parents peuvent-ils au mieux aider leur enfant ?

(Entretien entre Hélène Weber et Jean-François MICHEL)

On sait, bien entendu, que les parents interviennent pour aider leur enfant dans leurs devoirs à la maison. Mais est-ce que les parents peuvent leur apprendre autre chose que des leçons ? Par exemple, est-ce que les parents peuvent transmettre les procédés mnémotechniques (technique de mémorisation) à leurs enfants, afin que ceux-ci apprennent mieux ? Cela va au-delà de la simple aide aux devoirs.

Oui bien entendu. Lorsque l’enfant apprend à mieux repérer quel est son potentiel et de quoi il est capable, cela renforce la confiance en soi et les capacités pratiques de mémorisation et de compréhension. Parfois l’enfant a besoin que les choses soient traduites. Il y a des enfants qui lorsqu’ils lisent un live savent tout de suite comment utiliser et trier l’information. Et il y a des enfants qui ont besoin d’être davantage accompagné dans leur devoir.

Car tout simplement ils sont moins autonomes ou encore ils ont des difficultés de compréhension tout simplement. Donc que de connaître ces techniques de mémorisation chez les enfants c’est un grand bénéfice. D’autant que ces techniques de mémorisation ne sont pas forcément transmises à l’école ou par les enseignants, non pas par mauvaise volonté, mais tout simplement parce qu’ils ne les connaissent pas forcément ou pour d’autres raisons.

Donc connaître ces techniques de mémorisation ou procédés mnémotechniques, cela permet aux enfants de voir qu’ils ne sont pas nuls qu’ils ont des capacités et qu’ils sont tout aussi capables que les autres. Alors bien entendu, cette transmission des techniques de mémorisation ou des connaissances dépend aussi de la relation entre l’enfant et le parent de même que la simple aide au devoir d’ailleurs. Parfois il y a nécessité que les parents ne soient pas à la place de l’enfant qui apprend ou de celui qui enseigne, qui transmette comme un enseignant. Il faut qu’il y ait un tiers qui prenne le relais.

C’est-à-dire que par moments il est nécessaire qu’une autre personne, que ce soit pour la réalisation des devoirs à la maison ou la méthode de travail (comme la mémorisation,) prenne le relais du parent ? Quel peut être cette personne ? Et pourquoi c’est un important qu’une tierce personne prenne le relais du parent, surtout si celui-ci est compétent ?

À un moment, lorsque l’enfant à une difficulté d’apprentissage, et pas seulement dans le cadre des devoirs, il est important que le parent puisse intervenir et dénouer une difficulté de compréhension sur un sujet, sur un exercice ou plus généralement à propos d’une matière. Pour des enfants qui sont en grande difficulté, cela n’a rien à voir avec la compétence intellectuelle. Mais par contre il y a beaucoup d’affect comme aussi le fait de se sentir bien ou pas à l’école, de se sentir bien ou pas avec les enseignants ou dans la famille.

Quand l’affectif rentre en jeu (et c’est surtout le cas pour les enfants en difficulté ou en grande difficulté) c’est hyper aidant pour l’enfant en difficulté d’avoir recours à une personne extérieure ou un aidant extérieur. Cela peut être une tante, un cousin, un accompagnateur scolaire, un grand-parent. Cela n’exclut pas le fait d’avoir recours à du soutien scolaire pour l’aide aux devoirs ou encore à un coach scolaire pour dénouer des problèmes de méthode de travail par exemple. En tout cas une personne qui ne soit pas le parent (papa ou maman). Il faut que le parent accepte qu’il y ait une personne extérieure qui puisse aider l’enfant, que ce soit au niveau des devoirs ou pas.

Une personne extérieure est certainement beaucoup plus neutre. Mais n’est-ce pas un peu dommage de renoncer à une certaine compétence chez le parent ? Comme par exemple lorsque le papa est enseignant en mathématiques : il est compétent et donc logiquement est mieux à même à d’aider son enfant non ?

Théoriquement oui, mais ce qui compte ce n’est pas tant la compétence en elle-même que la possibilité de transmettre celle-ci. Et donc dans ce contexte l’affectif est important à prendre en compte pour que la transmission du savoir se fasse.

Pour résumer, le papa enseignant en mathématiques risque de se heurter à l’affect de son enfant qui alors ne sera pas réceptif. Bref c’est alors peine perdue. D’autant qu’il va s’installer une incompréhension entre le papa et son enfant : chez le père qui, de sa position d’adulte ne comprendra pas pourquoi son enfant ne profite pas de sa compétence, chez l’enfant qui ne comprendra pas pourquoi son père s’entête et qui fera un rejet. Rejet qui s’exprimera de différentes façons d’ailleurs, comme une non-écoute, une rébellion etc.

Oui, tout à fait ! La neutralité enlève le côté affectif ! C’est une chose importante à prendre en compte. Par exemple, le père de mes enfants me dit souvent, « toi qui est psychologue, tu devrais comprendre et te poser des questions vis-à-vis de la compréhension des enfants à l’école ». Cela paraît logique de son point de vue. Mais quand je suis avec mon fils, je suis sa maman, pas sa psychologue. Alors je sais que c’est difficile. Et c’est d’autant plus difficile que les parents sont compétents, qu’ils ont fait des études supérieures, qui sont dans le milieu de la psychologie, comme moi, ou qui sont dans le milieu éducatif comme être un enseignant. Bref, des parents qui ont objectivement toutes les compétences. Et c’est souvent à ce moment-là qu’il y a des crispations et des tensions qui se mettent en place. Et c’est à ce moment-là qu’il faut avoir la lucidité de consulter à l’extérieur.

Finalement, il ne sert à rien de vouloir convaincre son enfant, cela tournerait au dialogue de sourds. La relation parents enfants contrariée par l’affective pollue tout discours cohérent et utile entre le parent et de l’enfant.

Oui en effet! Mais il y a aussi le bon moment à identifier pour avoir recours à une personne extérieure. Il ne situe peut-être pas en primaire ou au collège (quoique) où l’intervention du parent reste pertinente notamment dans la réalisation des devoirs. Mais à partir du lycée et de l’université il est important que les parents fassent un pas de côté et qu’ils laissent leur enfant puiser dans ses propres ressources pour aller vers d’autres interlocuteurs, vers d’autres personnes.

Il y a des interlocuteurs compétents qui existent. Il y a un psychologue à l’université, une conseillère d’orientation au lycée ou au collège voire même une infirmière. Je pense que si les parents veulent être présents et doivent être présent c’est avant tout pour accompagner leur enfant vers ces interlocuteurs extérieurs.

Cela ne veut pas dire pour autant que les parents soient absents de toutes suggestions ou toute aide directe ?

Bien entendu que non. Tout dépend de la relation entre parents / enfants et du niveau affectif qu’il peut y avoir. Il n’y a pas vraiment de règle. Il faut tout simplement savoir évaluer les résistances, qu’elles soient passives ou visibles, avec l’enfant. Tout n’est pas blanc ou noir.

Il y a y aussi des relations parents / enfants où les parents ont découvert une technique de mémorisation par exemple et vont le faire découvrir à leurs enfants et cela va être pertinent. Il y a même la possibilité pour les parents de s’initier eux-mêmes à toutes les techniques de mémorisation, d’étudier les procédés mnémotechniques pertinents et de les présenter ensuite à leur enfant qui bute par exemple sur des problèmes de méthode de travail ou de compréhension de cours.

Mais quand on est devant des difficultés très importantes chez l’enfant et où il y a des résistances ou en tout cas lorsque cela devient tendu entre parents et enfants cela s’avère complètement inutile. Les parents ne doivent pas insister. Il faut retenir que dès l’instant que l’intervention parentale est sujette à crispation, à de la colère, à des tensions entre parents et leur enfant, il est alors nécessaire de consulter à l’extérieur de faire intervenir une tierce personne qui sera dans la neutralité.

— Voici 3 principes pour les parents qui veulent aider leur enfant —

Si votre enfant est école en primaire :

1. Veillez à ce que votre enfant établisse un bon rapport avec le fait d’apprendre. Il doit prendre du plaisir à apprendre. Votre enfant est plus lent à comprendre ses devoirs, il a des difficultés à mémoriser certaines informations ? Il se peut qu’il ait une façon d’apprendre bien différente que les autres enfants de son âge. Dans ce cas faites preuve  de bienveillance et de patience. Évitez absolument de culpabiliser votre enfant ou qu’il se sente coupable de ne pas avancer assez rapidement. Car autrement il va développer un rejet à l’apprentissage, un rejet à apprendre. C’est ce qu’il y a de pire. Si vous n’y prenez pas garde, ce rejet risque de se renforcer avec le temps.

2. Cherchez des moyens d’apprentissage ludique qui puisse convenir à votre enfant. Par exemple il peut s’essayer à l’utilisation des cartes mentales (mind map en anglais) ou carte heuristique. Faites des recherches sur internet sur les différents moyens ou astuces d’apprentissage. Cela peut aussi bien concerner la table de multiplication que la façon d’apprendre l’orthographe. Les ressources sont nombreuses sur internet. Mais surtout ayez une approche pragmatique. Posez-vous les questions suivantes :

Est-ce que cette méthode convient à mon enfant ?

Est-ce qu’il se sent à l’aise avec cette méthode, avec cet outil ?

Évitez l’erreur de vouloir absolument imposer une méthode à votre enfant parce qu’elle fonctionne bien avec les autres ou avec vous. Votre enfant est unique, il n’est pas vous ou les autres enfants et peut apprendre différemment.

3. Pensez à récompenser votre enfant pour ses efforts. Rien n’est plus gratifiant pour un enfant de se voir récompenser par ses parents. Attention, il ne s’agit pas de récompenser un résultat, mais un effort. Par exemple, si votre enfant a  travaillé ses devoirs un peu plus longtemps, il a fini un travail plus tôt que prévu. Récompensez-le. La récompense doit être proportionnée bien sûr. L’objectif de la récompense est d’encourager votre enfant à l’effort, qu’elle devienne une habitude. Au collège et au lycée, la quantité de travail demandée sera plus importante.  Ne faut-il ne pas, aussi, récompenser un résultat ? C’est un peu différent. Le résultat doit davantage  susciter des encouragements, des félicitations, de la reconnaissance. La récompense sur le résultat présente deux travers : celui d’un résultat trop haut (donc inatteignable et démotivant) et la propension à renoncer à l’effort. C’est ainsi que des enfants en font le minimum pour atteindre le résultat fixé.Ils n’utilisent pas toute leurs capacités ou ne les développent pas. À quoi bon !? Puisque le résultat est atteint.

Si votre enfant est au collège ou au lycée

Probablement que vous ne pouvez plus suivre votre enfant dans ses devoirs. C’est là qu’il faut savoir se mettre en retrait et prendre un autre rôle.

.1 L’aider à définir sa propre  méthode de travail en découvrant comment votre enfant apprend. Car les scientifiques, les spécialistes de la pédagogie sont unanimes : chacun apprend différemment. Comment apprend votre enfant ?  Il est trop jeune pour le découvrir par lui-même, pour se poser les bonnes questions. C’est à vous, parents, de l’aider sur ce point. Comment ? Par les profils d’apprentissage par exemple.

.2 Comme il est indiqué dans l’interview, n’hésitez pas à recourir à un professionnel qui pourra aider votre enfant à définir sa bonne méthode méthode de travail. Comme un coach scolaire par exemple. L’erreur classique est de croire que  les sociétés de soutien scolaire feront ce travail avec votre enfant. Apprendre à l’élève à adopter la bonne méthode de travail est très souvent un argument commercial et de différenciation pour ces sociétés.  Leurs professeurs ne sont que rarement formés à l’accompagnement personnalisé. Leur valeur ajoutée est dans la relation individualisée (de un à un) pour  combler des lacunes de connaissances.

.3 Intéressez-vous vraiment sur la vie scolaire de votre enfant. Soyez disponible (en matière de temps) pour répondre à ses questions, à discuter sur ce qu’il apprend. L’erreur de beaucoup de parents est de trop se reposer sur l’école.

Version courte de l’entretien en format podcast / audio – « Parents – comment aider son enfant dans les devoirs ?»

 

Hélène Weber est Psychologue clinicienne et docteur en Sociologie. Actuellement Hélène Weber travaille pour une école d’ingénieur afin de mettre en place un dispositif d’accompagnement des étudiants de première année en vue de les aider à s’adapter aux exigences des études supérieures.

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